Memoria
Sage et mature, parfois dure et impassible, Audren doit, comme tout le monde, son caractère actuel aux évènements qu'elle a vécue dans son passé. Issue d'un milieu plutôt aisé, elle a très tôt développé un don pour la magie comme sa mère, Diane, et sa grand-mère avant elle. Au grand dam de son père, Paul, qui voyait en elle, et ce dès sa naissance, une grande préceptrice qui aurait exercé son métier à l'abbaye d'Ashford.
Mais le don qu'elle avait de pouvoir contrôler les éléments la conduisit vers une toute autre voie. Elle fit des études à l'académie de Drascir, mena une enfance normale jusqu'à cette nuit de la saison du Phénix.
La maison était endormie quand la petite Audren, alors âgée de 9 ans, fut secouée par un terrible cauchemar et soudain, un rideau de sa chambre prit feu. Le feu se propagea rapidement le long des murs et sur le sol, quand elle se réveilla, son lit était déjà cerné par les flammes. Les vitres volèrent alors en éclat, le bruit éveilla les parents qui se précipitèrent vers la chambre de leur fille qui hurlait. Plus la petite Audren hurlait, plus l'incendie prenait de l'ampleur, des foyers se déclenchaient partout dans la maison autour de sa chambre. Sa mère utilisa ses pouvoirs et un torrent de glace parcouru le couloir en flamme, libérant l'accès à la chambre. Le père enfonça la porte, la mère invoqua un maelstrom qui inonda le sol, ouvra un passage jusqu'au lit d'Audren. Mais la chaleur dégagée par le brasier était si intense que la glace appliquée dans le couloir avait déjà fondu, toute la maison était en proie aux flammes. Paul pris sa fille dans ses bras, Emilie se dirigea vers la fenêtre située au premier étage, la seule issue. En un souffle glacé, elle créa une rampe qui allait leur permettre de glisser jusque dehors. Elle pressa son époux de sauter le premier avec Audren, ce qu'il fit. Puis vînt le tour de Diane.
Ce soir là, tous s'en sortirent vivant, mais quelque chose était mort dans cet incendie. Ce qui les unissait tous les trois. Le don qu'avait reçu Audren avait bien faillit leur être fatal. Dès lors Paul ne cessa de reprocher à son épouse d'avoir transmis ce don à sa fille, de l'avoir aidée à le développer même si au fond de lui il se sentait simplement exclu. Pourtant si ce pouvoir avait faillit causer leur perte il les avait également sauvés. Jamais ils ne dirent à la petite Audren que c'était elle qui avait déclenché, sans le vouloir, cet incendie.
Avec le temps ils reconstruisirent un foyer mais la chaleur de ce foyer avait disparue et sa mère, à la fois rongée par ce malaise permanent et par un mal mystérieux qu'aucun médecins ni aucun guérisseurs ne put soigner, fut emportée. Plus rien ne la retenant chez elle, définitivement fâchée avec son père et désormais majeure, Audren quitta peu de temps après son domicile d'Ascalon pour la ville de Surmia.
Elle décida par la suite de suivre le chemin de sa mère qui avait consacrée une grande partie de sa vie à aider les autres grâce à la magie. Sa mère possédait un pouvoir incroyable. Spécialisée dans les arcanes de l'eau, elle avait eu fort à faire pendant l'enfance de sa petite pyromane de fille surtout lorsqu'elle commença à développer des pouvoirs, encore fragiles et instables. Mais aujourd'hui, l'histoire semblait se répéter...
Un matin, elle reçut une lettre de son père lui disant qu'il devait lui parler au plus vite, qu'il avait quelque chose de très important à lui dire. Elle n'avait pas envie de le revoir, ni de l'entendre, mais le contenu de cette lettre l'intrigua et elle finit par se rendre chez son père dès le lendemain. Quand Paul ouvrit la porte à sa fille, il ne put dire un seul mot, ils se regardèrent longuement, puis il lui fit simplement signe d'entrer, ce qu'elle fit.
Ils passèrent dans le salon. Comme Paul ne semblait pas décidé à déserrer les dents, Audren pris la parole :
- Alors ? Qu'avais-tu de si important à me dire ?
Paul était impressionné, elle ressemblait tant à sa mère, la même force dans le regard.
- Ta mère et moi... Nous n'avons jamais été d'accord pour ce qui était de ton éducation. Elle voulait que tu développes tes dons et moi...
- Et c'est pour ça que tu m'as fait venir ? Je connais déjà cette histoire, dit-elle en se levant pour partir.
- Attends... J'avais tord...
Paul se leva et se dirigea vers une commode, du tiroir supérieur il sorti un cadre qu'il présenta à sa fille.
- C'est... dit-elle.
- Le diplôme de ta mère. De l'école de sorcellerie. Paul avait une mine défaite. Si seulement j'avais écouté ta mère, rien de cela ne serais arrivé et elle...
Audren le regardait fixement.
- Que veux-tu dire par là ?
- Rien, oublie cela...
- Réponds moi !
Il ne pouvait plus reculer.
- Si tu avais suivi ton enseignement dans une école de magie comme Diane le voulait, tu aurais appris plus tôt à maîtriser tes pouvoirs...
Audren commençait à comprendre où il voulait en venir, mais ne pouvait en croire un seul mot, elle avait les larmes aux yeux.
- Non, je n'en crois rien...
- Rien ne serais arrivé, l'incendie, ta mère...
- Tais-toi !
Les yeux de Paul se fixèrent tout à coup, sur le cadre que tenait sa fille. Audren baissa ses yeux larmoyants sur l'objet. Le cadre avait roussit là où sa main le tenait. Son père la regardait avec un mélange de peine et d'effrois. Audren compris qu'il disait vrai.
Elle ne revit plus jamais son père, ne reçut plus jamais de nouvelles. Il serait mort dans l'attaque de Surmia par les Charrs comme presque tous les habitants de cette ville pendant la fournaise.
Désormais, Audren ne vit plus que pour parfaire sa magie et protéger les autres, rongée par une culpabilité à jamais